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Centre Jean Bodin

Séparés par des virgules

STRADA Sciences et transdisciplinarité autour des Autoroutes

Symbole de la modernité et du progrès (technologique), l’Autoroute est associée à la question, aujourd’hui décisive, de la mobilité (voir le projet de loi d’orientation des mobilités). Elle véhicule ainsi tout un ensemble de valeurs constitutives du monde contemporain et de ses mutations : rapidité, vitesse et, plus récemment, sécurité ou écologie.


Mais, au‐delà de ce versant utilitariste et individualisé, elle induit une réflexion sur les rapports de l’homme à l’espace (environnement et territoires), à la société (culture, politique et histoire, patrimoine et tourisme) et au temps.


STRADA est alors une invitation à explorer – sur un mode résolument transdisciplinaire – les représentations et les imaginaires, les valeurs et les croyances mais aussi les pratiques et les conduites que suscite ce lieu singulier que l’on peut aussi appréhender comme une forme d’ « hétérotopie » moderne (Michel Foucault).

Objectifs du projet 

STRADA entend questionner cet écosystème qu’est l’autoroute à travers les imaginaires et les représentations qui y sont associés et qu’elle suscite sans négliger de prendre en compte les enjeux – multiples et décisifs – des mobilités contemporaines.

A ce titre STRADA se veut un laboratoire intellectuel pour penser la complexité des infrastructures modernes. Ces infrastructures, qui sollicitent en effet une multiplicité d’acteurs, constituent une configuration qui invite à analyser la place et la part de chaque catégorie d’acteurs (avec ses propres visées et finalités, stratégies et méthodologies) mais aussi les interactions qui sous‐tendent à la fois les prises de décision et leur mise en œuvre.
Si l’autoroute a suscité de nombreux travaux disciplinaires (notamment en géographie et en droit), peu d’études transversales existent sur cet objet. D’où une insatisfaction et une nécessité visant à combler une lacune en opérant un décloisonnement de la recherche afin d’appréhender l’autoroute (ses logiques d’acteurs et leurs stratégies) dans sa totalité.

Par son objet et son ambition, STRADA offre ainsi la possibilité de croiser et d’expérimenter à la fois sur le plan scientifique et méthodologique des « jeux d’échelles » qui portent, selon son initiateur Jacques Revel, aussi bien sur le choix de l’objet, les échelles d’observation, les variations d’échelles, exception et généralisation. Ce cadrage permet de distinguer plusieurs niveaux opératoires :

Des jeux d’échelles épistémologiques : STRADA entend croiser les représentations mentales et les pratiques, la prise en compte des données quantitatives (financières, économiques, statistiques….) mais aussi le poids des imaginaires et des interactions sociales qui se dérobent à toute velléité de quantification. Ce « jeu d’échelles » convoque la richesse et la diversité des regards scientifiques dans une indispensable transdisciplinarité. Au‐delà des SHS, le projet est susceptible de mobiliser des disciplines telles que l’architecture, le génie civil, l’informatique, l’électronique. De cette confrontation et de ce dialogue peut naître une réflexion scientifique féconde.

Des Jeux d’échelles dialogiques par la multiplicité des approches : académiques et universitaire, économiques (sociétés d’autoroute, entreprise de restauration etc…) et institutionnelles (acteurs décisionnels politiques, collectivités publiques). STRADA entend associer des représentants du monde de l’entreprise à des chercheurs, mêler des universitaires à des acteurs de la vie sociale, culturelle et associative autour de projets communs impliquant des partenariats public‐privé et des équipes multidisciplinaires.

Des jeux d’échelles spatiales à travers la dimension à la fois régionale mais aussi nationale et européenne (internationale) en croisant à la fois le local et le global.

Des jeux d’échelles temporelles. Au‐delà de la dimension historique, la question de l’autoroute comporte également une dimension prospective. Quels effets de l’autoroute sur le court, moyen et long terme ? (par comparaison par exemple avec le chemin de fer depuis le 19ème siècle). Il s’agit aussi de penser l’avenir de l’autoroute face aux défis prochains : énergétiques, environnementaux, de mobilité…

Dans cette perspective STRADA entend fédérer des collaborations nationales voire internationales puisqu’il concerne directement la politique des transports de l’Union européenne, notamment l'établissement et le développement de réseaux transeuropéens dans le secteur des infrastructures du transport, mentionnés dans le Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (articles 170 et suivants ‐ Agence exécutive «Innovation et réseaux») ainsi que la question des mobilités qui sont au coeur des sociétés contemporaines comme l’attestent tous les enjeux qui y sont associés :
transports, nouvelles technologies, contraintes environnementales accès au logement, à la santé, au travail, à la culture, à l'éducation, aux loisirs, etc.

Axes de Recherche

STRADA propose d’organiser cette recherche transdisciplinaire autour des cinq grands axes suivants (chaque axe est ainsi conçu comme mobilisant de façon préférentielle mais non exclusive un certain nombre de disciplines citées) :

1 Autoroute et développement durable : Droit, économie, géographie
Portiques, taxes, vignettes, aires écologiques, les programmes verts des sociétés d’autoroute (ressource en eau, protection des riverains contre pollution visuelle ou/ sonore, préservation de la bio‐diversité, éco‐rénovation des aires, réduction des émissions de CO 2 , co‐voiturage, régulation de vitesse).

2 « La carte et le territoire » : Droit, architecture, design, urbanisme, géographie, génie civil
L’autoroute et le paysage – recours administratifs (association du public à la décision) – problématiques de l’aménagement du territoire ‐ L’inscription dans le territoire (sa valorisation et sa promotion) – architecture, design : les ouvrages d’Art – Les autoroutes urbaines.

3 L’autoroute et le politique : Histoire, science politique, information et communication, architecture,
tourisme
Autoroute et fascisme ‐ politiques publiques – vitrines politiques (Modernité et vitesse en Italie fasciste et dans l’Allemagne nazie) région, décentralisation, tourisme, promotion identité régionale/locale) – Corruption et clientélisme – l’épopée autoroutière : entre désenclavement (Centre/périphérie) du territoire et exaltations des identités régionales (locales)

4 Mythologies autoroutières : anthropologie, littérature et cinéma, tourisme, histoire, science
politique
Autoroute : imaginaires et imaginations : l’autoroute dans les arts (cinéma, photographie, littérature, peinture…) – Les mythologies de l’autoroute : progrès – vitesse – sécurité – voyage et mobilité – promesses paradisiaques : l’autoroute du Soleil : vacances et héliotropisme – L’épopée autoroutière : de la modernité à l’hyper modernité : histoires d’autoroutes : passé, présent, avenir – les utopies autoroutières

5 Les aires d’autoroute : sociologie, droit, économie, anthropologie, tourisme
L’aire d’autoroute comme vitrine politique – comme lieu de tourisme : les plus belles, les plus insolites – la mutation des pratiques : de la fonctionnalité utilitaire à l’hédonisme sécuritaire Se reposer / Se restaurer – criminalité et délinquance ‐ Ethnologie de l’aire d’autoroute – Les enjeux économiques, écologiques (aires éco‐conçues) et juridiques

Disciplines concernées

Le projet STRADA entend s’inscrire dans une perspective transdisciplinaire et internationale, impliquant une multiplicité d’acteurs (scientifiques et académiques mais aussi économiques et institutionnels, notamment les différents observatoires des autoroutes). De nombreux champs disciplinaires, majoritairement ceux des sciences humaines et des sciences sociales, seront sollicités, même si des incursions dans le domaine des sciences et technique. Parmi les disciplines associées à ce projet, on peut citer les disciplines suivantes, en suggérant quelques pistes de travail :


Le Tourisme : mobilités vacancières – sites touristiques – les aires d’autoroute comme vitrines dugustatif…).


L’Economie : l’autoroute est non seulement un vecteur de l’économie mais aussi et plus largement un objet économique. Il implique : l’économie des transports – la circulation des biens – les dimensions financières : les coûts (pour les automobilistes comme pour l’Etat) des autoroutes : coûts de construction et de concessions – Les enjeux économiques pour les entreprises (restauration,supermarché, stations services….) ‐ l’économie  collaborative. Quels sont les effets induits de l’autoroute sur les économies (nationales ou régionales, par exemple à travers la participation des entreprises régionales de travaux publics) ?


La Géographie : redéfinition des paysages ruraux et urbains – enjeux de géographie sociale : le décloisonnement des territoires – les thématiques environnementales et écologiques (les portiques écologiques, les aires d’autoroute éco‐conçues, la lutte contre les pollutions et les nuisances visuelles, sonores…) – villes et autoroutes : la réconciliation ?


Le Droit : droit administratif – droit de l’environnement – droit de l’urbanisme ‐ droit du travail (conditions spécifiques sur les autoroutes et les aires d’autoroutes) – sécurité routière – police et douanes : surveillance, infractions et répressions ‐ les finances publiques – le Droit de l’Union européenne (réseaux, transports, travailleurs détachés…)


La Science politique : les politiques publiques – les enjeux électoraux ( la gratuité de l’autoroute en Corrèze par exemple – le clientélisme politique) – L’autoroute comme lieu de la contestation et de la protestation (le blocage, la gratuité des péages, les barrages filtrants, les opérations escargots).


L’Histoire : l’archéologie historique ‐ l’histoire des constructions autoroutières – l’autoroute comme vitrine des régimes politiques (fascistes notamment) – l’autoroute comme instrument de domination – les pionniers de l’autoroute – l’histoire des transports et des mobilités.


La Sociologie : sociologie des aires d’autoroutes – la confrontation des classes sociales – ethnologie de l’aire d’autoroute – la coexistence des mondes (salariés / vacanciers / routiers) – l’autoroute comme miroir de la société et de ses valeurs : évolution des attentes : de la vitesse (conforme au culte du Progrès dans les années 50/60) à la sécurité et au confort (hygiène, dimension récréative, visée sanitaire…) – l’autoroute et les faits divers – l’approche sociologique de la vitesse (le genre, la frustration, l’éducation) ‐ Le respect et la transgression des normes et des règles de conduite.


L’Anthropologie : l’autoroute entre mythologie et imaginaire du voyage – pour une lecture banale de l’autoroute – les représentations sociales et politiques de l’autoroute.


La Littérature, le cinéma, la photographie, la musique: l’autoroute au cinéma (Drôle d’endroit pour une rencontre), dans la littérature (Michel Tournier « l’aire du Muguet » dans Le Coq de bruyère, Julio Cortazar Les autonautes de la cosmoroute, Michel Lebrun, L’autoroute) – dans l’art contemporain (la performance de Candy Lenk et Anna Borgman) – le nomadisme dans la littérature – la musique (Kraftwerk : Autobahn).


Génie civil : technicité des ponts et chaussées – les ouvrages d’art (ex le tunnel du Mont Blanc) – les matériaux innovants (asphalte acoustique) – les matériaux écologiques ou recyclés (enrobé 100% recyclé) - Electronique – informatique : plateformes numériques – véhicules autonomes ‐ Architecture, Art et Design : l’autoroute comme lieu d’une prouesse architecturale et esthétique (Les ouvrages d’art comme le viaduc de Millau) – les aires d’autoroute comme lieux d’exposition artistiques. La santé : prévention des risques – sécurité – médecine d’urgence.

L'équipe du projet

Responsables scientifiques 

François Hourmant Professeur des Universités en Science politique - Centre Jean BODIN, Université d'Angers

Fabien Tesson Maître de Conférences HDR en Droit public - Centre Jean BODIN, Université d'Angers

Autres membres de l'équipe Projet

Pierre Leroux, Professeur des universités en Information & communication - Mutatum UCO

Nicolas Huten, Maître de conférences en Droit public, DCS (Droit et Changement Social), Université de Nantes

Frédéric Tesson, Professeur des Universités en Géographie et Ammenagement du territoire,  SET (Société Environnement Territoire), Université de Pau et des Pays de l'Adour.

Financeur

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