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BonDroit Bonheur & droit
Du 1 janvier 2016 au 31 décembre 2019
Pour plus de renseignements sur le DU Temps, travail et santé
La question du « bonheur » a toujours été parmi les plus discutées.
Certaines sciences dures (biologie et neurosciences) ainsi qu’un nombre croissant de disciplines des sciences humaines (philosophie, psychologie, sociologie, histoire et sciences économiques) ont investi le sujet.
Cet engouement pour les recherches sur le "bonheur" répond à une interrogation constante de l’homme et des sociétés.
Il surprend en revanche que cette notion paraisse toujours s’inscrire hors du champ de l’analyse juridique. Or, elle est un principe des droits de l’homme (déclaration d’indépendance américaine, déclarations françaises de 1789 et 1793, projet d’amendement actuel de la Constitution brésilienne...etc.).
Les travaux des économistes sur la mesure et les critères du bien-être repris et amplifiés par les organisations internationales incitent à prendre très au sérieux cet objectif des États d’amélioration de la qualité de vie.
Le projet BonDroit ambitionne donc de voir comment le droit et les politiques publiques tentent d’objectiver la recherche du bonheur en essayant, concrètement, de satisfaire les droits sociaux élémentaires, pour le bien-être du plus grand nombre.
QUELLES PERSPECTIVES POUR BONDROIT ?
- Devenir un projet pilote au niveau national et international en ce qui concerne la thématique du "bonheur".
- Consolider et créer des partenariats avec des laboratoires et des chercheurs de multiples disciplines intéressés par la question ;
- Être ressource pour les acteurs publics, entreprises privées et élus locaux et nationaux dans le cadre de la mise en œuvre du "bien-être" ;
- Fédérer différents acteurs autour d’un même projet, faire travailler des secteurs ou des personnes qui se rencontrent peu habituellement.
5 axes pour traiter le bonheur et le Droit
1. DROIT AU TRAVAIL ET PROTECTION SOCIALE
En droit social, si le bonheur ne constitue pas une norme juridique, il peut s’affirmer comme un principe de référence. Le droit du travail offre en ce sens des instruments juridiques et conventionnels pour y parvenir. Faut-il en conséquence concevoir le bonheur en droit social comme un simple principe, un principe normatif voire un principe subjectif ? Tel est le questionnement général.
Pour tenter d’y répondre, la recherche dans le cadre de cet axe sera nécessairement abordée sous l’angle conceptuel en s’interrogeant à l’appui des instruments juridiques et conventionnels, sur les notions de bien-être et de qualité de vie au travail, tant en ce qui a trait à l’entreprise en tant que structure privée, qu’en ce qui a trait aux structures publiques.
Dans le prolongement de ce questionnement, la thématique du bonheur interroge également la façon qu’ont la société et les pouvoirs publics d'envisager aujourd’hui la solidarité autour des problèmes liés à l’insertion professionnelle et à l’insertion sociale. Le concept de « marché du travail » intéresse ainsi les politiques d’insertion des plus éloignés de l’emploi ou les problématiques liées à la segmentation du marché des moins éloignés. S’intéresser en ce sens à la notion de « marché du travail », c’est aussi se préoccuper des politiques du logement, des problématiques de transports nécessaires pour permettre le travail ou des structures d’accueil des jeunes enfants.
Mais l’on ne peut omettre qu’en droit social, le dialogue social et la négociation collective constituent aussi des sources essentielles. De nombreuses obligations ou pratiques existent intéressant le bien-être au travail : gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, risques psycho-sociaux, stress, santé au travail, pénibilité ou organisation du travail. Ces différentes sources conventionnelles (accords de branche, de groupe ou d'entreprise) pourront être mobilisées dans le cadre du projet, croisant bonheur et droit.
Co-responsables de l'Axe 1 : Bernard Gauriau ; Franck Héas ; Martine Long
Membres de l'Axe 1 :Anne-Sophie Hocquet ; Hervé Rihal ; Agathe Vitour ; Adeline Morin-Trudelle ; Kouassi Aimé Malanhoua ; Gwendal Châton ; Karine Grévain-Lemercier ; Jean-Philippe Melchior ; Valentin Vacher
2 . DROIT À L'ÉDUCATION ET PROTECTION DE L'ENFANCE
Le respect du droit à l’éducation étant perçu comme la base de l’épanouissement personnel des individus, investir dans l’éducation est un moyen pour les gouvernants de réduire les inégalités, d’améliorer la qualité de la démocratie, de stimuler la prospérité et par là de contribuer au bien-être ainsi qu’au bonheur des citoyens. Plus largement, l’accès de tous à l’éducation et les garanties apportées par les institutions chargées de la protection de l’enfance produisent un effet vertueux sur des objectifs de développement comme la protection de l’environnement ou de la santé.
L’idée d’un « bien-être » pouvant inspirer la reconnaissance de droits fondamentaux comme le droit à l’éducation, présuppose que la personne humaine ne soit pas considérée abstraitement, mais qu’elle soit au contraire replacée dans son milieu social. Le bien être doit donc être nettement dissocié de l’idéal du bonheur individuel qui a imprégné le siècle des Lumières et les Déclarations de droits américaine (1776) et française (1789). Il renvoie à un idéal de bonheur collectif (ou partagé). Des missions d’intérêt général peuvent être dégagées à la fois dans le domaine de l’éducation et de la protection de l’enfance.
Dans la mesure où la réalisation du droit à l’éducation procure du bonheur à tout citoyen, comment les organisations internationales peuvent-elles prendre en compte la notion de bonheur dans la conception et les déclinaisons du droit à l’éducation ? Qu’en est-il plus spécifiquement pour l’enfance en danger ? Qu’en est-il des applications en France et dans plusieurs États et régions du monde ?
Au sein de cet axe, il s’agit d’abord d’identifier la prise en compte de la notion de bonheur par les conventions internationales dans le cadre normatif de l’Organisation des Nations Unies, tant pour le droit à l’éducation que pour le contrôle des décisions administratives et judiciaires appliquées à la situation des enfants. On en déduira un cadre théorique d’intégration du concept de « bonheur » dans les instruments de protection des droits fondamentaux applicables dans notre domaine d’étude.
Les préoccupations en faveur du bien-être au travail, par la prise en charge des risques à caractère socioprofessionnel, ont gagné les services de l’Education nationale, à l’image d’autres franges de service public, ce qu’il conviendra d’évaluer. Il restera alors à vérifier si ce mouvement s’est étendu à des domaines tels que la réparation des accidents scolaires.
On élargira la perspective suivant plusieurs échelles de droit comparé : en Europe, en Amérique latine, dans les pays africains en développement.
A l’appui des objectifs ainsi définis, l’axe 2 « Droit à l’éducation et protection de l’enfance » s’articulera autour de deux sous thématiques :
- Les paramètres du bonheur dans le droit de l’éducation et la protection de l’enfance
- Objectifs des politiques éducatives et études comparatives
Co-responsables de l'Axe 2 : Stéphanie Couderc-Morandeau ; Jérôme Wandji K ; Antony Taillefait
Membres de l'Axe 2 : Eric Mondielli ; Aude Cavaniol ; Sébastien Bélibi Daila ; Aline Vignon-Barrault ; Thomas Onillon ; Jacques Fialaire
3. DOCTRINES, DROIT CONSTITUTIONNEL COMPARÉ ET JUSTICIABILITÉ
On peut établir une distinction entre les doctrines concentrées sur le bonheur conçu comme une affaire privée (comme les doctrines hédonistes, épicuriennes, de certaines Lumières, etc.) et les doctrines valorisant le bonheur commun (Aristote, certaines Lumières aussi, Beccaria par exemple, etc.). Les premières portent leur attention sur la multitude des éléments concourant au bonheur (la disposition d’esprit, les capacités, la santé, le plaisir, la richesse, le bien-être matériel ou encore la condition sociale), en tentant de les hiérarchiser ; les secondes s’évertuent pour l’essentiel à objectiver les conditions sociales et économiques de la réalisation du bonheur.
A cela fait écho dans l’ordre politique, d’un côté une conception que l’on pourrait dire libérale du bonheur, et de l’autre une conception au contraire solidariste du bonheur. La dichotomie est simpliste mais elle rejoint un peu la vision américaine d’un côté et de l’autre la vision française, avec toutes les nuances qui sont nécessaires.
D’où des recherches qui se déploieront tout au long du projet sur la pensée antique (notamment des épicuriens), la pensée des Lumières, Bentham ou Stuart Mill. Il sera pertinent à cet égard de savoir également, dans une recherche liée à l’histoire du droit constitutionnel, ce que les révolutionnaires entendaient par le bonheur public ; dans un autre registre, plus spécifique à l’histoire des idées politiques : d’examiner la pensée des libéraux français des années 1920-1930, comme la pensée des socialistes du début du XXème siècle. Le tout pour jauger, à travers l’étude de ces doctrines, le rapport concret qu’a, ou pas, la société, au bonheur. Le bonheur est-il une simple formule qui relève de l’incantation ou est-elle une notion opérationnelle, un objectif social ayant vocation à recevoir une application ?
Le regard porté sur le droit pose véritablement cette question, si l’on interroge nombre de constitutions qui font référence à la notion de bonheur, de bien-être ou qui évoquent encore l’épanouissement personnel. C’est envisager les déclarations françaises et américaines de droit, mais aussi les constitutions du Bhoutan, du Japon, de la Corée du Sud et de la Corée du Nord ; du Niger, de la Turquie, ou le projet en cours au Brésil. La perspective comparatiste est ici sollicitée pour savoir si l’on peut dégager des schèmes directeurs d’analyse de la notion de bonheur, des conditions objectives du bonheur selon les approches politiques ; ou au contraire savoir si le bonheur relève d’une conception uniquement subjective non seulement pour les individus mais aussi pour les Etats, principalement au regard de la donnée culturelle. L’apport du droit comparé pourrait donc favoriser les recherches doctrinales et théoriques sur les rapports entre le droit et le bonheur. Il pourrait aussi permettre de développer une approche plus expérimentale, en étudiant les modalités de mise en œuvre de ce droit dans les différents systèmes nationaux.
Il s’agira aussi de savoir si la notion de bonheur a une efficience juridique qui peut en tant que telle être revendiquée. C’est évoquer ici les questions multiples de la normativité, de l’efficience et de la justiciabilité de la notion de bonheur.
A l’appui de ces réflexions, l’axe 3 « Doctrines, droit constitutionnel comparé et justiciabilité » s’articulera autour de deux sous-thématiques :
1. Histoire, théories et doctrines du bonheur ;
2. Droit comparé et justiciabilité.
Co-responsables de l'Axe 3 : Félicien Lemaire ; Jean Fougerouse ; Caroline Renaud-Duparc
Membres de l'Axe 3 : Marc Bouvet ; Jimmy Charruau ; Florence Even ; François Hourmant ;Yannick Lécuyer ; Xavier Martin ; Pierre Négrel ; Timothée Masson ; Frédéric Le Blay ;Vassili Tokarev
4. DROIT, ÉCONOMIE ET POLITIQUES PUBLIQUES DU BIEN-ÊTRE
La mesure du bien-être est débattue depuis très longtemps en économie. Elle remonte à Smith, considéré comme le père de l’économie dans son ouvrage la théorie des sentiments moraux (1754) qui reliait l’économie aux sciences morales et politiques. On la retrouve aussi chez les premiers utilitaristes, à la suite de Bentham (1748-1832), pour lesquels toute action est dirigée par la recherche du plaisir et l'élimination de la peine. La statistique vers laquelle tous les yeux sont rivés reste le PIB. S'il est vrai que, ceteris paribus, une augmentation du PIB augmente le bien-être, cet indicateur reste insuffisant, pour au moins deux raisons :
- Il n'enregistre que la production de biens et services, ce qui a une double conséquence : les biens et services obtenus hors marchés, en fort développement aujourd'hui sous l'impact des réseaux sociaux (covoiturage, revente...), n'entrent pas dans son calcul, tout en faisant le bonheur des protagonistes ; les destructions ne sont pas prises en compte alors qu'il a été démontré, à la suite de Kahneman et Tversky (1979), que les pertes ont un impact psychologique négatif plus fort que les gains. Il y a là un lien à étudier justement entre le droit, qui permet d'éviter les pertes si pénibles, et les nouveaux champs de l'économie qui étudient ce trait psychologique. Certains auteurs (Gauriau, 2012) rappellent que le bonheur n'est pas une finalité du droit, qui poursuit d’autres objectifs. La notion relevant davantage de l’idéal, de l’imagination, voire d’une aptitude personnelle. Toutefois, le droit tend à préserver le bonheur ou plus exactement le bien-être en sanctionnant, par exemple, les comportements à l’origine de situations de mal-être, de souffrances ; en participant à la prévention, à la gestion et à la résolution des conflits….
- Le bien-être dépend d'un ensemble de facteurs, et non un seul. Ces facteurs peuvent être sociaux ou tenir aux traits de caractères de chacun (optimisme, estime de soi…). Par exemple, l'Homme aspire à vivre plus longtemps mais la longévité n'est pas prise en compte dans le PIB. Ainsi, l'IDH (indice de développement humain) a été proposé par Sen et Ul Haq dans les années 90, comme une meilleure mesure du bien-être, en tant qu’indicateur du développement humain plutôt que du seul développement économique. Il dépend du PIB par habitant, mais aussi de l'espérance de vie et du niveau d'éducation. Depuis l’expérience de l’IDH, plusieurs conférences internationales ont réfléchi sur les moyens de dépasser l’approche quantitative de la richesse des pays par le PIB.
Par ailleurs, le sentiment de bien-être dépend également de facteurs sociaux et économiques (statut, état, mariage, revenus, temps de travail et de loisirs etc….) sur lesquels les politiques publiques peuvent agir. Ainsi, ces politiques publiques œuvrent en faveur des populations les plus dignes d’intérêt social ou les plus fragiles: enfance, handicap, vieillesse, maladie... Cet intérêt pour le bien-être s’exprime également à travers la redistribution des richesses, fonction assurée par l’Etat et qui contribue à corriger les inégalités subies par ceux pour lesquels le bien-être est le plus bas. Les objectifs poursuivis sont alors divers, tels que la solidarité, la lutte contre la pauvreté, la réduction des inégalités …..Le bien-être ou plutôt le mieux-être n’est alors qu’un effet de cette politique, qui a pour finalité première d’assurer la cohésion et la paix sociales.
Comment l'Etat peut-il favoriser le bien-être, quand sa situation dépend du PIB ? En effet, la TVA, proportionnelle au PIB, représente la moitié de ses recettes, et les impôts sur les revenus et sur les bénéfices sont aussi conditionnés par cet agrégat économique. Comment valoriser une économie collaborative? Plus généralement comment faire coïncider pleinement les objectifs de l’Etat et les aspirations de chacun au bien-être?
Une définition plus positive du bien-être à laquelle le droit, l’économie et la gestion pourraient participer mériterait d'être établie, justement parce que l'opposition subjectivité/objectivité qui bloque le débat peut-être dépassée. L’économie ici rejoint les préoccupations de la gestion et du droit mais aussi des politiques publiques qui ont un double objet : favoriser la génération du bien être pour les différents acteurs sociaux et redistribuer si besoin cette forme de valeur en faveur des plus faibles afin de les protéger.
A l’appui de ces réflexions, l’axe 4 « Droit, économie et politiques publiques du bien-être » s’articulera autour de deux sous thématiques :
1. Economie du mieux-être ;
2. Politiques juridiques.
Co-responsables de l'Axe 4 : Serge Blondel ; Sophie Lambert-Wiber ; Camille Baulant
Membres de l'Axe 4 : Sabine Bernheim-Desvaux ; Christophe Daniel ; Fabien Tesson ; Thierry Cailleau ; Xavier Pautrel ; Maria Pautrel Maslianskaia ; Margaux Laviron ; Mouna El Haddani Hmied ;Dominique Sagot-Duvauroux
5. SENSIBILISATION AU BONHEUR ET MOBILISATION DES ACTEURS TERRITORIAUX LIGÉRIENS
’axe 5 est moins dédié à la recherche, à proprement parler, mais plutôt à la transformation de la recherche académique des autres axes en recherche-action et en valorisation sous forme de formations et d’expérimentations. Ainsi conçu l’objectif de l’axe est donc double :
- Déterminer et construire l'intérêt de cette recherche auprès des acteurs institutionnels et associatifs qui sont confrontés d'une manière ou d'une autre aux problématiques du bonheur et du bien-être social sur le territoire ligérien ;
- Traduire la recherche par des pistes d'actions innovantes auxquelles les acteurs pourraient être formés, soit sous forme de séminaires, soit par des expérimentations que nous les aiderions à construire.
S’il est vrai que la notion de bonheur est a priori subjective et relève en tant que telle d’un parti pris intellectuel, lié immanquablement à une conception du bonheur, il conviendra néanmoins, dans la volonté d’objectivation qui est celle du projet, de recenser les acteurs territoriaux concernés par les politiques publiques autour du bonheur : élus, acteurs institutionnels et détenteurs de l’autorité publique, associations, et d’une manière plus générale acteurs de l’économie sociale et solidaire.
Le caractère subjectif de l’approche du bonheur ou du bien-être, ne pouvant toutefois être d’emblée écartée, cela justifiera l’évaluation par les acteurs eux-mêmes des politiques publiques participant à la mise en œuvre de cette notion. Par suite, des distinctions seront certainement établies entre les politiques de droit à la subsistance, les politiques liées au bien-être, et les actions privées autour de cette notion.
Étant entendu que selon les acteurs concernés (élus, associations, techniciens, entreprises privées), le droit au bonheur et les actions qui y participent, ne peuvent être définis de manière identique, l’écoute et les échanges avec les acteurs ligériens permettront ainsi de recenser leurs attentes et les problématiques les plus fréquentes faisant obstacle à la mise en œuvre d’un droit au bonheur.
A partir des objectifs ainsi définis, l’axe 5 « Sensibilisation et mobilisation des acteurs territoriaux ligériens » s’articulera autour de deux sous thématiques :
1. Evaluation des politiques publiques par les acteurs territoriaux ;
2. Mise en place de bonnes pratiques.
Co-responsables de l'Axe 5 : Anne-Sophie Hocquet ; Hervé Rihal ; Serge Bouju ; Vincent Gaboriau
Participants à l'Axe 5 : Acteurs socioéconomiques
Le responsable scientifique
Félicien Lemaire