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Centre Jean Bodin

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Handicap, Droit et Responsabilité Le droit de la responsabilité des personnes publiques à l’épreuve du handicap

Le projet Handicap, Droit et Responsabilité a pour objet de s’interroger sur la manière dont le droit et, plus spécialement, le droit de la responsabilité des personnes publiques (essentiellement l’Etat, les collectivités territoriales et les établissements publics) appréhende la question du handicap. Il s’inscrit dans les deux axes du Centre Jean Bodin : d’une part, l’axe 1 « Patrimoine, entrepreneuriat, cohésion sociale et justice », notamment sous son aspect « Cohésion sociale », et, d’autre part, l’axe 2 « État(s) et Europe, nouvelles régulations ». Il s’intègre par ailleurs dans l’axe 6 de la SFR Confluences (Santé, bien-être, âges et cadre de vie) et répond à la politique de l’Université d’Angers en faveur de l’égalité des chances. Si le projet a une dimension essentiellement juridique, il a naturellement vocation à associer des universitaires d’autres disciplines ainsi que des praticiens, compte tenu du caractère pluridisciplinaire de la question du handicap.

Les objectifs du projet Handicap, Droit et Responsabilité sont multiples.

  • Il s’agit, d’une part, de procéder au recensement de l’ensemble des situations de handicap pour lesquelles la question de la responsabilité des personnes publiques se pose clairement ou est, au moins théoriquement, susceptible de se poser.
  • D’autre part, le projet a pour objectif de clarifier, en matière de handicap, les règles régissant le droit de la responsabilité des personnes publiques et d’interroger leur pertinence.
  • Il s’agit, en outre, de se pencher sur les réformes récentes ou en cours relatives au handicap et de les confronter à la question de la responsabilité des personnes publiques

Impacts attendus

Ce projet a pour ambition, grâce à l’organisation de diverses manifestations scientifiques et aux publications qui en seront issues (la Revue de Droit Sanitaire et Social sera ici sollicitée), de rendre plus lisible le droit qui s’applique, sous l’angle du handicap, à la responsabilité des personnes publiques et de s’interroger sur le devenir des règles juridiques en question.

  • Impact pratique

Il s’agit de proposer une clarification, voire une amélioration du droit applicable, dont pourront se saisir aussi bien les personnes handicapées elles-mêmes et les associations de défense des droits des personnes en situation de handicap, que les personnes publiques susceptibles d’être confrontées à des demandes d’indemnisation.

  • Impact théorique

Il s’agit de proposer une réflexion sur les fondements et les modalités de mise en œuvre, en matière de handicap, du droit de la responsabilité des personnes publiques.

  • Issue du projet

Le consortium établi grâce à ce projet de recherche aura vocation à être développé : au-delà de la question du handicap, il pourra être envisagé d’étudier plus globalement la question relative à la manière dont le droit de la responsabilité des personnes publiques appréhende la vulnérabilité.

Problématique scientifique :

Les situations de handicap sont particulièrement hétérogènes : eu égard, d’abord, à leurs causes (accident, maladie, anomalie génétique, etc.) ; eu égard, ensuite, à leurs formes (handicap physique, sensoriel, psychique ou encore mental). Elles intéressent, quoi qu’il en soit, les pouvoirs publics. Diverses mesures permettent ainsi de compenser, d’accompagner ou encore d’encadrer le handicap. Prenons trois exemples parmi d’autres : des aides financières sont mises à la disposition des personnes atteintes d’une incapacité permanente significative ; les établissements recevant du public doivent être accessibles aux personnes handicapées ; les établissements publics de santé sont susceptibles de prendre en charge des patients atteints de troubles mentaux.

Depuis la loi d'orientation en faveur des personnes handicapées du 30 juin 1975 qui a créé une obligation nationale de solidarité à leur égard, plusieurs réformes législatives se sont succédé pour renforcer les droits des personnes en situation de handicap. Celle du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées figure parmi les plus importantes. Elle instaure notamment, au bénéfice de la personne handicapée, un « droit à la compensation des conséquences de son handicap quels que soient l'origine et la nature de sa déficience, son âge ou son mode de vie » (art. L. 114-1-1 du code de l’action sociale et des familles), qui s’est très concrètement traduit par la création de la prestation de compensation du handicap. Depuis, d’autres lois sont intervenues, de manière plus ponctuelle, telle la loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé qui instaure le « plan d’accompagnement global » de la personne handicapée.

Il n’y a néanmoins pas matière à se satisfaire entièrement de la situation actuelle. Depuis un peu plus de trois ans, la presse se fait très largement écho d’un nouveau scandale sanitaire ayant pour origine la Dépakine, médicament prescrit pendant plusieurs décennies à des femmes enceintes et ayant engendré pour leur fœtus des malformations et/ou des troubles du développement importants. Dans un tout autre domaine, la Commission Nationale Consultative des Droits de l'Homme s'inquiétait, il y a peu (en juillet 2018), du projet de loi ELAN, depuis adopté par le Parlement, qui réduit fortement la proportion de logements devant être accessibles aux personnes handicapées dans la construction neuve. Dernière illustration récente : en avril 2018, le Défenseur des droits observait que le handicap était la première cause de discriminations en France (Rapport annuel d’activité 2017). Les exemples pourraient encore être multipliés.

Le projet Handicap, Droit et Responsabilité propose de se pencher sur la manière dont le handicap est saisi par le droit et, plus spécifiquement, par le droit de la responsabilité des personnes publiques, entendu ici comme l’obligation, pour l’Etat, les collectivités territoriales ou les établissements publics, de réparer les dommages causés à autrui.

Dans ce cadre, il s’agira, dans un tout premier temps, de recenser les situations dans lesquelles le handicap est ou pourrait être à l’origine de l’engagement de la responsabilité des personnes publiques. Diverses hypothèses devront, de ce point de vue, être envisagées.

La première est celle des dommages causés par les personnes handicapées. Celles-ci sont, dans ce cas, placées dans la position d’auteurs des dommages en cause, dont une/des personne(s) publique(s) va/vont pourtant, dans certaines circonstances particulières, avoir à répondre (v. notamment le cas des dommages causés par des patients atteints de troubles mentaux hospitalisés dans des établissements publics de santé).

La seconde hypothèse est bien différente, puisqu’elle correspond aux dommages qui, cette fois-ci, sont subis par les personnes handicapées (v. par exemple la question de la scolarisation des enfants atteints de troubles autistiques). La responsabilité des personnes publiques peut alors être engagée à leur égard, celles-ci ayant, non plus la qualité d’auteurs des dommages en cause, mais celle de victimes. Cela renvoie à l’absence ou à l’insuffisance de mesures de protection prises par l’administration au bénéfice de ces personnes, carence éventuellement source d’un droit à indemnisation.

Une troisième hypothèse mérite l’attention : elle concerne le handicap congénital. Celui-ci constitue également une source potentielle d’engagement de la responsabilité des personnes publiques, qu’il ait été provoqué, aggravé ou non atténué au cours de la grossesse ou qu’il n’ait pas été décelé ou révélé au cours de celle-ci.

Dans un second temps, Il s’agira, à propos de ces différentes hypothèses, d’étudier les modalités d’engagement de la responsabilité des personnes publiques.

Le projet Handicap, Droit et Responsabilité conduira ainsi à s’intéresser aux règles applicables en matière de responsabilité des personnes publiques du fait des dommages causés ou, au contraire, subis par les personnes handicapées (voire leur entourage). Au moins deux questions seront abordées : la première porte sur les conditions d’engagement de la responsabilité des personnes publiques ; la seconde a trait à l’identification des personnes publiques responsables.

Il s’agira, dans un troisième temps, de mettre le droit de la responsabilité des personnes publiques à l’épreuve et de s’interroger, plus précisément, sur le fait de savoir si les conditions dans lesquelles cette responsabilité est mise en œuvre donnent entière satisfaction.

Face à ce qui semble être une profonde hétérogénéité (voire une insuffisance) du traitement, par le droit de la responsabilité des personnes publiques, des situations de handicap (ex. : application de régimes de responsabilité pour ou sans faute), il s’agira, d’une part, d’en comprendre les raisons et, d’autre part, de s’interroger sur la cohérence des règles juridiques actuellement applicables.

Il conviendra, en définitive, de proposer des pistes d’amélioration du droit applicable. Précisons, à ce propos, que l’enjeu ne sera pas uniquement celui d’une éventuelle amélioration des conditions dans lesquelles les victimes bénéficient d’une indemnisation. En effet, se poseront, plus globalement, la question de l’accès aux droits par les personnes handicapées (ex. : droit à la scolarisation, s’agissant des enfants handicapés), ainsi que celle de l’évolution des politiques publiques en matière de handicap.

Originalité du projet

La question du handicap en droit n’est pas entièrement nouvelle. Toutefois, comme j’ai pu le constater à l’occasion de la rédaction d’un article sur « Le handicap saisi par le droit de la responsabilité administrative » (à paraître dans les Mélanges en l’honneur d’Hervé Rihal), cette question n’a pas, ou de manière très peu significative, été envisagée sous l’angle spécifique du droit de responsabilité des personnes publiques. Le projet Handicap, Droit et Responsabilité se propose d’y remédier.

Il convient de préciser que, si le projet soumis a essentiellement vocation à se concentrer sur les règles de responsabilité issues du droit public, la comparaison avec les règles de droit privé dans des situations comparables s’avèrera particulièrement utile. Le droit public et le droit privé de la responsabilité s’influencent en effet mutuellement (N. Albert, F. Leduc, O. Sabard (dir.), Droits privé et public de la responsabilité extracontractuelle, Etude comparée, LexisNexis, 2017). Au-delà même de la relation droit public-droit privé, ce projet de recherche se situe à la croisée de diverses disciplines juridiques, en sollicitant aussi bien le droit de l’aide et de l’action sociales, le droit de la santé que le droit des libertés publiques et libertés fondamentales.

L’originalité scientifique du projet est avérée car, tout en s’inscrivant dans les deux axes du Centre Jean Bodin, il est notable que le thème de recherche proposé n’a pas jusqu’à maintenant fait l’objet d’un traitement spécifique par les enseignants-chercheurs du laboratoire. Il conforte par là même la démarche ouverte avec le projet AgéDroit, de renforcement de la collaboration avec le pôle Santé de l’Université d’Angers. Il renforce, ce faisant également, la synergie créée avec le pôle LL-SHS, notamment avec les psychologues en ce qui aura ici spécifiquement trait à la question du handicap psychique.

Enfin, le projet s’inscrit dans la politique de l’Université d’Angers en faveur de l’égalité des chances et, en particulier, les actions en faveur des étudiants en situation de handicap à travers le Relais Handi3A.

Organisation du projet (consortium, livrables…)

Le projet Handicap, Droit et Responsabilité a vocation à mobiliser divers enseignants-chercheurs de la Faculté de Droit d’Angers, aussi bien publicistes que privatistes, en consolidant le consortium établi autour de la thématique du bien-être dans le cadre du projet BonDroit mais aussi AgéDroit. A ce titre, plusieurs d’entre eux seront sollicités, tels que Martine Long, Hervé Rihal, Aline Vignon-Barrault et Antony Taillefait, auxquels il convient d’ajouter Antoine Béguin, maître de conférences et avocat spécialisé dans le droit de la santé.

En raison de la dimension potentiellement pluridisciplinaire du projet, il sera en outre fait appel aux enseignants-chercheurs de la Faculté de Santé (Clotilde Rougé-Maillart, notamment) avec lesquels je collabore d’ores et déjà en matière pédagogique, ayant été recrutée en septembre 2015 sur un poste qui me conduit à effectuer près de la moitié de mon service d’enseignement au sein de la Faculté de Santé, dans le cadre de Pluripass. La participation des enseignants-chercheurs en psychologie de l’UFR Lettres, Langues et Sciences Humaines pourra également être sollicitée.

Ce projet a, enfin, vocation à associer à d’autres acteurs : l’Université d’Angers elle-même, en tant qu’elle mène une politique en faveur des étudiants handicapés ; ou encore les divers relais locaux qui existent sur la question du handicap (collectivités territoriales et secteur associatif). Parmi eux, on pense à la Région des Pays de la Loire, celle-ci ayant mis en place, depuis les années 2010, certains partenariats (notamment avec l'AGEFIPH) dans le but de favoriser l’égalité d’accès à la formation et à l’emploi et s’étant également engagée en tant qu'employeur dans des démarches de recrutement et d'amélioration des conditions de travail des agents en situation de handicap. Le réseau de Samuel Portanguen, chef du service des affaires juridiques à la Région des Pays de la Loire récemment recruté en la qualité de PAST dans notre Université, sera à cet égard précieux. La ville d’Angers, qui anime une politique volontariste visant à faciliter la vie quotidienne des personnes en situation de handicap, ainsi que la Maison départementale de l’autonomie du Maine-et-Loire pourront également être sollicitées.

 

La responsable scientifique

Phillipine LOHEAC-DERBOULLE

Financeur

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